La 1° Légion du Rhône 1870

La 1ère LÉGION du RHÔNE dans la GUERRE de 1870-1871

Septembre 1870 : la guerre contre l’Allemagne est bien mal engagée et la défaite de Sedan entraîne la chute de l’Empire et son remplacement par le gouvernement de la Défense Nationale. Celui-ci tente de continuer la lutte en créant dans l’urgence des régiments nouveaux.

Le colonel Celler

La CONSTITUTION du RÉGIMENT
Ainsi un décret du 1er octobre crée dans le département du Rhône un régiment de marche de 3000 hommes à 3 bataillons d’infanterie, appelé 1ère Légion du Rhône. Il est composé de recrues célibataires et de volontaires engagés. Le commandement est confié au colonel (à titre provisoire) Celler. Les soldats sont regroupés dans les bâtiments des frères Maristes à St-Genis-Laval, où ils sont habillés, équipés (fusils Chassepot) et exercés en urgence.

L’ENTRÉE en CAMPAGNE
Le 10 novembre au matin la Légion quitte St-Genis-Laval pour être à midi place Bellecour. Son drapeau lui est remis au cours d’une prise d’armes ; le préfet Challemel-Lacour fait une allocution patriotique et la colonne quitte la ville pour s’arrêter le soir à Limonest. Dès le lendemain à Villefranche le 2ème bataillon se mutine : 3 meneurs arrêtés sont fusillés le matin suivant. La légion gagne ensuite en train Chagny pour stationner de Verdun-sur-le-Doubs à Besançon. Un premier accrochage avec les allemands a lieu le 20 vers St-Jean-de-Losne. Le régiment marche en direction de Dijon, puis rétrograde sur Beaune le 1er décembre, jour où elle est incorporée dans la brigade du jeune général (à titre provisoire) Crémer.

Le Général Crémer

CAMPAGNE EN CÔTE-D’OR : COMBATS de CHÂTEAUNEUF et NUITS
Le 2 décembre la Légion marche de Beaune à Bligny sur-Ouche, qu’une brigade badoise de 6000 hommes vient de quitter. Les avis du Cdt Valentin amènent Crémer à placer ses troupes par une marche rapide à Châteauneuf, position dominant la vallée où passent le canal de Bourgogne (et aujourd’hui l’autoroute). Le 3 décembre au matin l’artillerie ouvre le feu sur les allemands en bivouac dans la vallée. La 1ère Légion est en première ligne pour contenir les contre-attaques de l’infanterie. Cette journée est un succès : les allemands se retirent, ayant perdu 400 hommes et 100 prisonniers. Les pertes françaises sont minimes. La brigade Crémer retourne séjourner à Beaune.

Le 10 décembre la Légion prend la route de Dijon et vient occuper Nuits-St-Georges. Le 18 une reconnaissance est menée au nord vers Gevrey, tandis qu’une division de 15000 allemands partis de Dijon se dirigent sur Nuits par un chemin plus à l’est. La Légion qui risque d’être débordée se replie rapidement et vient se poster au nord-est de Nuits le long de la tranchée du chemin de fer sur un front de 3 kilomètres. Là elle subit le choc frontal des allemands : la fusillade est très violente, le colonel Celler est mortellement blessé. En même temps un duel d’artillerie oppose les batteries allemandes dans la plaine et l’artillerie française établie sur la colline de la Chaux de l’autre côté de Nuits. Ses munitions épuisées la troupe doit décrocher, se replie sur Nuits bombardée puis sur le plateau. La Légion a subi de lourdes pertes : 169 tués, 562 blessés, 120 prisonniers. Les allemands éprouvés vont également se replier le lendemain.

La bataille de Nuits

La Légion est dirigée sur Chagny, puis Chalon sur Saône et à nouveau Beaune jusqu’au 28. Le commandant Valentin est nommé colonel à la place de Celler. Elle est ensuite envoyée en train vers Besançon après 36 heures d’attente dans les wagons par un froid glacial.

Le colonel Valentin

L’ARMÉE DE L’EST
Au 1er janvier 1871 la 1ère Légion du Rhône est incorporée dans le 24° corps d’armée (CA)(général Bressoles) formé à Lyon, formant avec les 15°, 18° et 20° CA l’Armée de l’Est du général Bourbaki. L’armée quitte Besançon le 3 janvier en direction du nord-est et s’établit devant Villersexel (70). Le 9 les allemands s’emparent de la localité, mais ils en sont chassés par la contre-attaque victorieuse de l’armée. Le 3 ° bataillon de la Légion se distingue dans un combat annexe.
L’armée reprend sa marche vers Belfort le 13 janvier par un froid glacial. Dans le combat d’Arcey, la 1ère Légion s’illustre en prenant le village de Chavanne.
Les allemands couvrant Belfort se sont fortifiés le long du cours de la Lizaine entre Héricourt (70) et Montbéliard (25). L’armée attaque le 15 ; le 24° corps est au centre entre Héricourt et Montbéliard. L’artillerie allemande surclasse l’artillerie française. Malgré leurs efforts dans un froid glacial et sans ravitaillement l’armée ne peut franchir la Lizaine. Montbéliard investie par le 15° corps doit être évacuée et au bout de 3 jours d’efforts infructueux, Bourbaki se résigne à la retraite. Dans cette bataille d’Héricourt la Légion compte une centaine de tués, blessés ou disparus et beaucoup de malades.

La bataille d’Héricourt

La RETRAITE
La retraite de la 1ère Légion passe par Arcey, l’Isle sur le Doubs, puis le massif du Lomont par le col de la Ferrière le 24. L’armée est talonnée par les allemands. Le 26 la troupe marche 22 heures dans la neige pour parcourir 60 km vers le sud, puis c’est Morteau en enfin Pontarlier le 29. Le 30 ils sont à Mouthe, où est connu la nouvelle de la signature d’un armistice. La Légion rétrograde sur Vaux au nord du lac de St-Point, où elle se heurte aux Prussiens, refoulant devant eux les débris du 15°corps. La retraite reprend sur les Hôpitaux et la frontière suisse. La Légion a gardé sa cohésion et voit défiler pendant 2 jours une colonne interminable de troupes en désordre. Le 2 février au soir le colonel Valentin se résigne à faire passer la frontière à sa troupe, qui est désarmée.

Carte des opérations : les mouvements français sont en vert

L’INTERNEMENT en SUISSE
87000 hommes de l’Armée de l’Est sont passés en Suisse et internés. Les 625 légionnaires du Rhône (sur 3000) parvenus en Suisse sont internés à Payerne, où ils peuvent enfin se reposer. Mais 43 hommes meurent encore de maladie, avant que le régiment ne puisse quitter Payerne le 10 mars. Les légionnaires sont emmenés en train et bateau jusqu’à Genève ; de là ils gagnent à pied Chambéry où ils sont démobilisés.

Le SOUVENIR
En 1887 un monument « Aux Enfants du Rhône » est inauguré devant l’entrée du Parc de la Tête-d’Or à la mémoire des Légionnaires et aussi à celle des Mobiles du Rhône partis eux début septembre 1870 au siège de Belfort pour tenter d’inverser le cours de la guerre.

Article de 2017 –

Sources : un officier – Historique de la 1ère Légion du Rhône – Ch.Méra Lyon 1871 / Claude Berthet – Étapes et combats d’un régiment de marche en 1870 -J.Poncet Lyon 1913 (Bibliothèque Militaire) / V.Duclert – 1870-1914 – Belin 2010