Tom Morel et les Glières

« TOM » MOREL (1915-1944) et la PLATEAU des GLIERES

Théodose Morel naît à Lyon en 1915, dans une famille bourgeoise, catholique et patriote. Son oncle et parrain est Georges Raymond qui commandera l’escadrille des »Cigognes » après la mort de Guynemer. Après une jeunesse un peu espiègle et un passage par le scoutisme, où il rencontre Henri Grouès (l’abbé Pierre), il entre à Saint-Cyr en 1935. Sous-lieutenant, il est affecté au 27° Bataillon de Chasseurs alpins (BCA) à Annecy. Morel devient rapidement le second du lieutenant Yves Godard qui commande la Section d’Eclaireurs Skieurs (SES). En 1938, il devient le chef de la SES qu’il entraîne durement et continuellement.

Tom Morel

Dès la déclaration de guerre en 1939, le 27° BCA part dans les Vosges, mais la SES, à sa grande déception, reste dans les Alpes dans le secteur Tignes – Val d’Isère, où le lieutenant Morel poursuit l’entraînement. Le 10 juin 1940 l’Italie rejoint l’Allemagne dans la guerre. Le 12 sa section fait prisonniers des Alpini (1ère citation) et Morel est blessé au bras droit le 18. La SES est déplacée dans le secteur de de défense de Bourg-Saint-Maurice, où il stoppe des tentatives d’attaque (2ème citation et Légion d’Honneur).

Le 29 juillet les restes du 27° BCA rejoignent Annecy et passent sous les ordres du commandant Jean Vallette d’Osia, avec pour adjoint le capitaine Maurice Anjot. Pendant le temps d’existence de l’Armée d’Armistice, cet état-major met tout en oeuvre pour dissimuler le maximum de matériel, avec pour principal exécutant le lieutenant Morel, chargé du parc auto. En 1941-42 Morel est muté instructeur à l’Ecole Militaire Spéciale (Saint-Cyr) repliée sur Aix-en-Provence. Fin 1942 la zone libre est occupée et l’Armée d’Armistice démobilisée.

Cdt Vallette d’Osia

Sous une couverture civile, Morel rejoint Annecy au début de 1943 et entre sous le pseudonyme de « Tom » dans l’Armée Secréte (AS) en Haute-Savoie sous les ordres de Vallette d’Osia son ancien chef. Il cache son jeu pendant quelques mois en s’affiliant à la Légion Française des Combattants, mais le 8 septembre 1943 les allemands remplacent les italiens en Haute-Savoie. Vallette d’Osia est arrêté peu après et son homologue Romans-Petit chef de l’AS dans l’Ain prend en charge la Haute-Savoie. Morel passe alors dans la clandestinité et est nommé commandant opérationnel en décembre. Romans-Petit et Tom proposent le plateau des Glières comme lieu de parachutage de l’armement qui fait cruellement défaut aux « maquisards ». Rosenthal envoyé du BCRA (Bureau Central de Renseignement et d’Action de la France Libre) décide d’y regrouper les maquis, afin de créer un « abcès de fixation », afin d’immobiliser des unités allemandes et de persuader les Alliés de la combativité de la Résistance. Romans-Petit s’y oppose jugeant l’action prématurée, car les résistants sont encore trop faibles et trop vulnérables pour être regroupés. Mais Romans-Petit doit retourner dans l’Ain et sera remplacé par le capitaine Humbert Clair « Navant » (ancien du 13°BCA) en Haute-Savoie. Le 30 janvier 1944 « Tom » donne aux différents maquis l’ordre de regroupement aux Glières.

Plateau des Glières

Les maquisards s’installent progressivement sur le plateau enneigé ; « Tom » infatigable parcourt à skis le plateau pour coordonner ses hommes. Les forces fidèles à Vichy se renforcent [Garde (ex-républicaine – gendarmes), GMR (Groupements Mobiles de Réserve -policiers) et Milice] ; le 12 février une première embuscade est tendue à la Garde à la montée de l’Essert à l’est des Glières. Tom Morel rencontre leur chef le commandant Raulet : les gendarmes paraissent peu enclins à lutter contre les clandestins. Le 20 février a lieu le première cérémonie aux couleurs sur le plateau. Des parachutages d’armement et de ravitaillement ont lieu les nuits des 13 et 15 février, 4 et 11 mars. Le 29 « Tom » rencontre le Cdt Lefèvre des GMR ; mais ceux-ci arrêtent le 1er mars le médecin auxiliaire Fournier. Après plusieurs tractations vaines, « Tom » fait investir le village d’Entremont dans la nuit du 9 au 10 mars pour obtenir la libération du jeune médecin : 60 hommes des GMR sont faits prisonniers, mais Morel est tué traitreusement par Lefèvre qui est aussitôt abattu. Le 13 mars dans une grande émotion Tom Morel est inhumé aux Glières devant ses hommes, en présence de ses parents venus de Lyon.

Le capitaine Anjot

Le capitaine Anjot est volontaire pour lui succéder. Mais dès le 22 mars la 157° division de réserve allemande prend position autour du plateau. L’assaut final a lieu le 26 mars: dans la soirée Anjot, estimant la résistance vaine, donne l’ordre de repli. C’est lors du repli que le gros des pertes sera à déplorer. La chasse à l’homme se poursuit pendant 5 jours ; Anjot est tué avec quelques autres sur un barrage. Au total 155 hommes tués au combat, 30 disparus, 160 prisonniers massacrés ou déportés, soit les 3/4 des effectifs de l’ »abcès de fixation » des Glières .

La devise de Tom Morel jeune chef charismatique était : « vivre libre ou mourir« . En novembre 1944, il est fait Compagnon de la Libération ; la décoration est remise à sa veuve par le Général De Gaulle lui-même. Madame Tom Morel est décédée récemment en novembre 2010.

Le nom de Tom Morel a été donné en 1989 à la 174° promotion de St-Cyr et en 1998 au nouveau quartier du 27° BCA à Cran-Gévrier dans la banlieue d’Annecy. Une place des pentes de la Croix-Rousse à Lyon porte également son nom. Un de ses petits-fils Yvan Morel a commandé le 27° BCA en 2019-2021

Article de 2010 Source : Patrick de Gmeline – TOM MOREL héros de Glières -Presses de la Cité 2008