Le GRENIER D’ABONDANCE ou CASERNE DE SERIN à LYON
Ce majestueux bâtiment de 130 m de long et de 18 m de largeur, avec un corps central surmonté d’un fronton triangulaire, est situé à Lyon sur la rive gauche de la Saône, quai Saint-Vincent, au pied de la falaise rocheuse de la Croix-Rousse. Il est mitoyen du côté nord avec le fort Saint-Jean, bastion de l’enceinte de la Croix-Rousse. Au pied du fort se trouvait la porte de la ville au XVII° siècle, qui ouvrait au nord sur le faubourg de Serin.
Du « GRENIER D’ABONDANCE » à la « CASERNE de SERIN »
Le bâtiment est construit de 1722 à 1728 sur les plans de l’architecte Bertaud de la Vaure pour stocker le blé nécessaire à l’alimentation de la ville de Lyon, soit 60000 hl, d’où le nom de Grenier d’Abondance. Son architecture est très fonctionnelle et l’escalier central est remarquable. Le fronton de l’édifice porte des cornes d’abondance.
Cette première destination ne durera qu’une trentaine d’années, car dès 1763, l’Edit de libre circulation des grains le rend inutile. En 1777 le bâtiment devient une emprise militaire, la seule de Lyon, pour loger les compagnies suisses. A la Révolution le rôle militaire du bâtiment demeure sous le nom de « Caserne de Serin« .
HISTOIRE DE LA CASERNE
Un décret impérial de 1810 transfère aux villes la propriété de certains bâtiments militaires, dont » le grand Quartier de Serin pour l’infanterie, y compris la partie de dernier bâtiment qui sert de manutention ou de magasin de vivres ». Dès 1810 une partie servait donc de stockage. Cela sera confirmé en 1829: la caserne abrite les subsistances militaires, transférées en 1840 à l’ex-couvent Ste Marie aux Chaînes proche, qui devient alors les « Subsistances » . Le quartier de Serin est à nouveau une caserne qui abrite 1260 hommes en 1864 et 750 hommes en 1886. Diverses unités d’infanterie s’y succèdent (…52° RI, 157° RI, 5° RIC…) et enfin la Gendarmerie jusqu’en 1987.
L’histoire d’une caserne au XIX° siècle est complexe, car souvent le régiment qui l’occupait n’y revient pas après les manœuvres d’été et intègre une autre caserne. Ainsi deux bataillons du 52° RI y séjournent en 1885-86, avant le 157°RI, dont nous allons parler plus longuement.
Le 157ème RÉGIMENT D’INFANTERIE
Une loi de 1887 crée 18 régiments d’Infanterie (RI) supplémentaires, formés de bataillons prélevés sur 54 autres régiments, soit 18 nouveaux régiments à 3 bataillons. Le recrutement de ces unités devait se faire sur leur région d’implantation, d’où leur nom de « régiments régionaux« . Parmi ces nouvelles unités, les 157°, 158° et 159° RI vont être orientés vers la défense des Alpes. Les 157° et 158° basés à Lyon doivent fournir un ou deux bataillons en poste en montagne. Le 157° d’Infanterie est créé le 1er octobre 1887 : le 1er bataillon est logé à Modane, le 2° au camp de Sathonay et le 3° à Lyon. A l’été 1888 tout le régiment se regroupe à Briançon pour des manœuvres. Les 1° et 3° bataillons reviennent à Lyon à la caserne de Serin et au fort Saint-Jean et le 2° va s’établir au fort de Tournoux en Ubaye en amont de Barcelonnette (04).
En 1890 les 157° et 158° sont réunis en une brigade la « Brigade Régionale de Lyon » commandée par le général Zédé, futur gouverneur militaire de Lyon. Le 159° RI est très vite affecté à Briançon, il sera appelé le « Régiment de la Neige ». Ces 2 régiments participent en 1891 aux travaux des routes stratégiques des Alpes (col de Vars…).
Le 157° forme en 1891 un 4ème bataillon destiné à s’établir à Jausiers en Ubaye entre Barcelonnette et le fort Tournoux. Le 157° RI va conserver ce dispositif jusqu’en 1913 : 2 bataillons à Lyon à la caserne de Serin, 2 bataillons en Ubaye. En 1906 les 1° et 4° Bat. sont à Lyon, le 2° au Fort-Tournoux et le 3° à Jausiers. La photo ci-dessous est prise dans la cour devant la falaise. Le 157 utilise l’esplanade du Clos-Jouve à la Croix-Rousse comme terrain d’exercice.
En 1913 la brigade régionale de Lyon est dissoute, le 157° d’Infanterie est déplacé à Gap. Puis c’est la Grande Guerre : après 3 ans sur le front de France, le 157 est débarqué en janvier 1917 à Salonique, où il va participer à la campagne de l’Armée d’Orient. Au moment de l’Armistice, il est en Hongrie sur les bords du Danube, où il reste jusqu’en août 1919. Il revient en France pour y être dissous à la fin de l’année.
Le 5ème RÉGIMENT d’INFANTERIE COLONIALE
Après les grandes manœuvres de 1913, ce régiment d’infanterie coloniale (RIC), créé en 1890, composé de recrues de la métropole effectuant leur service, arrive à Lyon en octobre 1913 et s’installe à la caserne de Serin libérée par le départ du 157°. Moins d’un an après le régiment part au front. Il doit revenir à la caserne de Serin à la fin de la guerre, car il y est présent en 1922 et il y est dissout en 1924.
La DRAC RHÔNE-ALPES
Le bâtiment libéré par la Gendarmerie en 1987 est affecté au ministère de la Culture, qui fait appel aux architectes Valode et Pistre pour rénover et adapter les locaux à leur nouvelle destination dans le respect de la structure de cet édifice historique. La Direction Régionale des Affaires Culturelles (DRAC) de la région Rhône-Alpes s’y installe en 1993, ainsi que la classe de danse du Conservatoire de Musique.
Notre histoire militaire du bâtiment est incomplète et difficile à reconstituer. Quand la Gendarmerie s’y est-elle installée ? Si un visiteur de ce site peut nous aider à la compléter, qu’il nous contacte par le mail museemilitairelyon@hotmail.fr ; son apport sera le bienvenu.
Article de 2012 – Dernière modification 01/2023
Sources : le 157° régiment d’Infanterie – historique – Lyon 1892 / album photographique – A.Gelly 1906