La PRISE DE LYON PAR LES PROTESTANTS ET LA MUNICIPALITÉ PROTESTANTE 1562-1563
La MONTÉE DU PROTESTANTISME
Dans les années 1550 les idées protestantes, surtout calvinistes, se diffusent à Lyon. En 1560 les protestants ou réformés s’organisent ; ils font une tentative pour prendre la ville en septembre. C’est un échec ; la reprise du contrôle de la ville par le lieutenant-général Antoine d’Albon en l’absence du gouverneur Jacques d’Albon de Saint-André est suivie de quelques exécutions.
Fin 1561 d’Albon quitte Lyon ; il est remplacé par François d’Agoult comte de Sault plus conciliant, peut-être secrètement favorable aux protestants. Il essaye de maintenir la concorde, alors que les tensions montent.
La PRISE DE LYON
Le 29 avril 1562 au soir un millier de protestants en armes se réunit à la Guillotière ; dans la nuit ils investissent les points stratégiques de la ville. Seuls les chanoines de Saint-Jean résistent dans leur cloître avant de s’enfuir. Le 30 les protestants sont maîtres de la ville. Deux jours plus tard ils investissent le cloitre fortifié de Saint-Just livré au pillage. Pour conforter leur prise, ils font appel au baron des Adrets, qui accourt avec sa troupe le 5 mai. Il assiège le château Pierre Scize qui se rend le 7 mai. Il n’y a pas eu de massacre à Lyon.
Dans les jours qui suivent, les réformés les plus fanatiques détruisent les statues de la façade de la cathédrale Saint-Jean à coups d’arquebuse, dégradent et saccagent l’intérieur. L’horloge astronomique est détériorée. Tous les églises et couvents sont pillés ; les objets précieux sont récupérés, car le baron des Adrets a besoin d’or pour payer ses troupes et repartir en campagne. Il repassera brièvement à Lyon à 2 reprises pendant l’été.
L’INSTALLATION
Les protestants élisent 12 échevins réformés, qui s’ajoutent aux élus du consulat en place ; mais le pouvoir réel est détenu par le Consistoire des réformés. Le culte catholique est remplacé par le culte réformé. Le comte de Sault lieutenant-général est maintenu dans un premier temps pour préserver la fiction de la fidélité au roi.
En juillet le prince de Condé chef des protestants envoie à Lyon Jean de Parthenay seigneur de Soubise prendre le gouvernement de la ville et y rétablir l’ordre.
Les GRANDS TRAVAUX
Le consulat protestant entreprend des travaux d’urbanisme d’une ampleur inédite pour améliorer la défense et la circulation dans la ville. L’église et le cloître de Saint-Just sont complètement démolis et on ouvre la montée du Chemin-Neuf. Un terrain de manœuvre, la future place Bellecour, est dégagée, et on perce les actuelles rues Emile Zola et Chambonnet pour relier la place à la Saône et aux Jacobins. D’autres petites églises sont démolies pour élargir rues et places : Ste-Croix et St-Etienne accolées à St-Jean, le cloitre de St-Paul, St-Laurent et St-Eloi près de St-Paul, le cimetière St-Nizier, St-Saturnin près de St-Pierre, St-Cosme…
La RÉACTION ROYALE
Le duc de Nemours, qui fait campagne dans la vallée du Rhône pour le roi et le camp catholique est nommé Gouverneur du Lyonnais après la mort de Saint-André à la bataille de Dreux (19/12/1562).
Pendant l’hiver Soubise envoie un fort contingent de soldats piller des vivres dans la Dombes pour ravitailler Lyon.
Nemours en profite pour tenter de libérer Lyon : de Vienne il s’avance jusqu’à Saint-Genis-Laval, mais il échoue à prendre la ville. Son avant-garde qui avait réussi à entrer est piégée et massacrée.
La REPRISE EN MAINS
L’Édit royal d’Amboise (18 mars 1563) impose la paix et la coexistence entre les 2 cultes. C’est une terrible déception pour les réformés lyonnais, qui vont devoir se soumettre et admettre le retour des autorités catholiques. Pour cela ils obtiennent que ce ne soit pas avec Nemours, c’est donc le maréchal de Vieilleville qui entre à Lyon au nom du roi le 15 juin 1563 et assure la remise en ordre. En juillet le comte de Sault retrouve son poste de lieutenant-général. Le culte catholique est rétabli, mais les réformés sont autorisés à ouvrir 3 lieux de culte. Les réformés continuent à administrer la cité jusqu’en décembre, où a lieu l’élection du consulat. Ils sont contraints par Vieilleville d’accepter la parité : un consulat à 6 catholiques et 6 protestants pour 1564.
QUELQUES ANNÉES DE PAIX 1564-1567
La reprise en main de la ville entraine le déclin de l’influence des protestants. Antoine d’Albon revient à Lyon comme archevêque (1564-1574).
En 1564 Catherine de Médicis et le jeune roi Charles IX font le tour du royaume. Ils sont à Lyon du 9 juin au 9 juillet ; l’entrée solennelle a lieu le 13 juin 1564. Le roi décide la construction d’une citadelle en haut des pentes de la Croix-Rousse, pour maintenir la ville dans l’obéissance. Les lyonnais ne cesseront de demander sa démolition, effective en 1585. La parité disparait au consulat pour 1565 : 8 catholiques pour 4 protestants…
Le gouverneur Jacques de Savoie duc de Nemours ne fait son entrée dans la ville qu’en septembre 1565. Ses lieutenants-généraux sont Jean de Losses (1564-66), Birague (1566-68), puis Mandelot (1568-1571) qui remplacera Nemours comme gouverneur en 1571.
Entre temps la guerre civile aura repris en septembre 1567…
La tutelle des Réformés sur la ville de Lyon n’a duré que 13 mois ; mais cette courte période a été très marquante dans l’histoire de la ville… Vingt-sept ans plus tard la ville sera à nouveau en dissidence avec le pouvoir royal en adhérant à la « Ligue » ultra-catholique 1589-1593 sous le gouvernement de Charles-Emmanuel de Nemours…
Article de 05/2021
source : Yves Krumenacker -Lyon 1562 capitale protestante – Olivétan 2009