La BATAILLE d’ANTHON (11 juin 1430) :
Dans les années 1420, la Guerre de Cent-Ans contre les Anglais se complique avec l’alliance anglo-bourguignonne scellée après l’assassinat du Duc de Bourgogne Jean-sans-Peur par les hommes du Dauphin Charles (1419). Ce dernier a obtenu le soutien des Lyonnais après la défaite d’Azincourt (1415) et devient en 1422 Charles VII Roi… à Bourges. Son armée est vaincue à la bataille de Verneuil en 1424 (9000 tués dont la moitié de notre région). Orléans est assiégée et les troupes royales ridiculisées à la bataille des « harengs » (1428) : le renouveau survient avec Jeanne d’Arc en 1429.
L’AMBITION D’UN PRINCE
À cette époque troublée, la Franche-Comté est unie à la Bourgogne sous les grands ducs de Bourgogne. Un seigneur franc-comtois, Louis de Chalon, seigneur d’Arlay-Nozeroy, devenu par héritage de sa mère prince d’Orange, pro-bourguignon, prétend avoir des droits sur la seigneurie d’Anthon en Dauphiné.
Dès 1428, Louis de Chalon profite de la faiblesse régionale pour envoyer une troupe s’emparer de châteaux dans la région du Velin entre Crémieu et le Rhône : Colombier, Anthon, St-Laurent de Mure, puis Pusignan, Azieu. Il y laisse une petite garnison. En 1429 le roi n’a pas les moyens de réagir. Louis de Chalon cherche à se tailler une principauté en Dauphiné. Il est soutenu en sous-main par Amédée VIII de Savoie, qui aurait sa part dans un démembrement du Dauphiné. Au printemps 1430 il rassemble une armée composée de contingents du Jura, de Vaud, de Fribourg, de Neuchâtel et de Savoie.
L’ORGANISATION DE LA DÉFENSE
Raoul de Gaucourt, nommé gouverneur du Dauphiné après avoir brisé le siège d’Orléans aux cotés de Jeanne d’Arc, réunit les chevaliers dauphinois. Il est rejoint par Humbert de Grolée , sénéchal de Lyon et son contingent lyonnais, ainsi que deux compagnies de lombards conduites par Burnon de Caqueran et Théodore de Valpergue. Il fait en plus appel à Rodrigue de Villandrando, capitaine de routiers espagnols établi avec sa troupe à Annonay.
L’armée ainsi composée se rassemble à la Côte-St-André vers le 27 mai. Elle se propose de reconquérir les places tenues par les « orangistes ». Elle reprend d’abord Auberives (sur Varèze au sud de Vienne), puis Pusignan le 7 juin, Azieu le lendemain et le 10 juin Colombier après une grande résistance des assiégés. Le soir les chefs tiennent conseil et optent pour l’embuscade, car leur armée est inférieure en nombre.
La BATAILLE
Le 11 juin, Louis de Chalon, averti du siège, se met en route depuis Anthon pour secourir Colombier, qui a en fait capitulé la veille ; sa route traverse le bois des Franchises (plus étendu à l’époque que maintenant), où l’armée dauphinoise moins nombreuse, attend qu’il s’y engage complètement. La tête de la colonne est alors attaquée de front par les routiers de Villandrando, la forêt empêche les orangistes de se déployer ; ils cherchent à se replier. Mais toute la colonne est alors attaquée de flanc par Gaucourt et Grolée. Ceux qui tentent de fuir sont pris à revers par la cavalerie lombarde C’est la débandade et le massacre des « orangistes » : environ 300 morts, 600 prisonniers mis à rançon. Le prince d’Orange réussit à s’échapper en traversant à cheval le Rhône à Anthon ; il trouve refuge le soir au château de Meximieux ; puis penaud regagne ses terres.
Le surlendemain à Crémieu sont vendus 1200 chevaux harnachés récupérés et beaucoup d’armes et d’armures ; l’étendard rouge et or d’Orange fut exposé à la cathédrale Saint-Jean à Lyon. Gaucourt entre à Anthon, où le château est déserté, puis va s’assurer du château de Fallavier encore aux mains des orangistes. Tandis que Grôlée regagnait Lyon, Gaucourt et Villandrando descendent assiéger Orange. La ville se rend le 3 juillet et les autres places de la principauté (Gigondas, Jonquières, Courthezon) font leur soumission. Mais fin août la ville d’Orange se soulève contre ses occupants dauphinois ; elle est remise provisoirement au comte de Provence.
ÉPILOGUE
Cette victoire conservait le Dauphiné à la couronne de France. Gaucourt fut nommé premier chambellan, Grôlée conseiller et chambellan du roi, Villandrando reçut le château de Pusignan. Théodore de Valpergue sera le sénéchal de Lyon de 1435 à 1458. Une stèle commémorant cette bataille est érigée sur la route à l’est de Janneyrias.
Mais les inquiétudes des lyonnais ne sont pas terminées, malgré le traité d’Arras entre Charles VII et Philippe le Bon duc de Bourgogne (1435). En effet la trêve laisse sans emploi un grand nombre de routiers : le point culminant est le massacre des habitants de Vimy (actuelle Neuville-sur-Saône) et de Genay au début de 1443. Il faut l’intervention des armées royale et savoyarde pour ramener la paix dans la région. En 1447 le dauphin Louis futur Louis XI viendra gouverner le Dauphiné pendant une dizaine d’années.
Article de 2010 – Dernière modification 04/2019
Sources : Philippe Gaillard – Anthon 11 juin 1430 – Historic’one 1998 / Lyon Rive Gauche n°27 12/1968 / vignette Gilbert Bouchard -L’Isère en BD t.2 – copyright Glénat