Le Dauphiné Féodal

Le DAUPHINÉ FÉODAL 1030-1349

Le Dauphiné est une province de France regroupant les 3 départements de l’Isère, des Hautes-Alpes et de la Drôme. Quatre siècles ont été nécessaires au Moyen-Âge pour constituer une province unifiée.

Les DÉBUTS AVEC la MAISON D’ALBON
En l’an 1000 le territoire du Dauphiné fait partie du Royaume de Bourgogne Provence, royaume en pleine décadence, qui se fragmente en principautés féodales de plus en plus indépendantes. C’est ainsi que vers 1029 la reine Ermengarde épouse du dernier roi Rodolphe III cède ses droits sur le Viennois à son parent Bouchard évêque de Vienne, lequel à son tour en partage la « garde » à des parents :
- le Nord-Viennois (bas-Dauphiné) et Sermorens (pays de Voiron) au premier comte de Savoie Humbert Ier. St-Symphorien d’Ozon, St-Georges d’Espéranche, Fallavier, Septème sont des châteaux savoyards.
- le sud-Viennois à Guigues le vieux sire de Vion (en Ardèche du nord) : il est le premier seigneur de ce qui sera le Dauphiné.
Guigues le vieux (+ vers 1057) se titre comte d’Albon du nom d’un château au sud de Vienne. Il est soutenu par son oncle Humbert évêque de Grenoble et son frère Humbert évêque de Valence. il étend ses terres vers l’est : Grésivaudan et vallée de l’Isère en aval de Grenoble vers 1050. De plus l’empereur lui inféode en 1039 le Briançonnais qui s’étend sur les 2 versants des Alpes : le versant oriental est aujourd’hui italien (Oulx, Exilles…).

Guigues Ier laisse 3 fils : Guigues II le gras (+vers1080) qui lui succède, Gui-Raymond qui par mariage assure à ses descendants le comté de Forez et Humbert évêque de Grenoble. Guigues II obtient la seigneurie d’Argental. Son fils Guigues III (+1032) inaugure pour des raisons inconnues la tradition à nommer son fils Dauphin en deuxième prénom. À la fin du XIII° siècle ce prénom deviendra le titre princier de dauphin (de Viennois).

Guigues IV Dauphin s’affronte avec son beau-frère et voisin Amédée III de Savoie : il est battu et tué à Montmélian en 1142. Son successeur Guigues V meurt en 1162, laissant le comté à sa fille Béatrice d’Albon.
La maison d’Albon a surtout procédé à des réarrangements avec ses vassaux, principalement les Clermont, les Bressieu, les Bocsozel, les Roussillon. La principauté est en 2 morceaux : entre le Viennois et le Briançonnais s’interposent le Trièves (au sud de Grenoble), la principauté de Royans (tout le Vercors jusqu’au Royans actuel) et le diocèse de Die.

Blason du Dauphiné féodal

Les PRINCES de la MAISON de BOURGOGNE 1184-1281
Béatrice se marie d’abord avec Albéric de Toulouse qui se titre comte d’Albon de Grésivaudan et de Viennois. Elle épouse ensuite (1184) Hugues III duc de Bourgogne (+1192 à la croisade) ; leur fils Guigues-André devient Guigues VI dit André-Dauphin sous la régence de sa mère. Les comtes de la maison de Bourgogne vont poursuivre la politique d’expansion. Le mariage de Guigues VI lui rapporte en 1232 l’Embrunais et le Gapençais, venant du démembrement du comté de Forcalquier.
Après Guigues VI André (+1236) son fils Guigues VII (+1269) lui succède ; il est le premier à utiliser le blason au dauphin sur son sceau.
Son mariage avec l’héritière du Faucigny (de Annemasse à Beaufort) lui apporte ce fief enclavé dans le comté de Savoie. Par ailleurs il achète Beauvoir (en Royans) dont il fait sa résidence et il grignote le Royans en annexant St-Marcellin. Son fils et successeur Jean Ier meurt en 1281 sans postérité.

Les principautés vers 1280

Les DAUPHINS DE LA MAISON DE LA TOUR 1281- 1349
L’héritage va à sa sœur Anne-Dauphine épouse de Humbert baron de la Tour (du Pin) et sire de Coligny. La baronnie de la Tour (de Crémieu à Bourgoin) est enclavée dans les terres de Savoie et Coligny est au nord de la Bresse qui devient savoyarde en 1272. Humbert devient Humbert Ier dauphin. Le prénom est devenu titre princier et on parlera désormais de Dauphiné pour cette principauté agrandie. Mais l’intrication des terres du Dauphiné et de la Savoie vont être à l’origine de la guerre de Septante Ans entre les 2 principautés.
À Humbert Ier succèdent Jean II (1308-1318), puis son fils Guigues VIII.

Bague de Guigues VIII (musée de l’Evéché Grenoble)

Le musée de l’Evêché de Grenoble détient une bague à son nom : GVIGO.DALPHINVS.VIENNENSIS.ET.ALBONIS.COMES. Guigues VIII reprend la lutte contre le comte de Savoie : il est vainqueur à Varey en 1324, mais est tué d’un carreau d’arbalète au siège de la Perrière (1333). Son frère Humbert II lui succède, il signe la paix à Chapareillan en 1334. Il développe l’administration du Dauphiné en créant le Conseil Delphinal et la Chambre des Comptes dont le siège est fixé à Grenoble. Mais Humbert II dépense sans compter et achève de se ruiner dans une croisade inutile en Palestine en 1345/47. Son épouse est morte sur l’île de Rhodes.

Tableau du XVIII° siècle figurant Humbert II

Veuf sans héritier, il avait envisagé de céder sa principauté au pape. C’est finalement le Roi de France qui ne laisse pas passer une telle occasion et en 1349 le Dauphiné est cédé à Charles fils aîné de Jean le Bon. L’abdication a lieu à Lyon le 16 juillet 1349.

À l’avenir l’héritier du Roi de France portera le titre de Dauphin de France. Charles reste quelques mois dans sa principauté puis regagne Paris en 1350 à la mort de son grand-père le roi Philippe VI de Valois.
Humbert reçoit une grosse somme d’argent, une pension annuelle et entre dans les ordres. Il allait devenir évêque, quand il meurt prématurément en 1355.

La suite de l’histoire du Dauphiné est développée dans les articles Guerres féodales entre Savoie et Dauphiné et « Le Dauphin en Dauphiné ».

Article de 2019 – Dernière modification 09/2020
Sources : Bernard Bligny – Histoire du Dauphiné – Privat 1973 / Généalogie & Histoire 177 – CEGRA 12/2018