BATAILLES en SAVOIE : PONTCHARRA-CHAMOUSSET-Les MOLLETTES et FORT BARRAUX 1591-1598
Après avoir récupéré ses états en 1559, le duc de Savoie Emmanuel-Philibert les gouverne sagement. Son fils et successeur Charles-Emmanuel Ier le Grand (1580-1630) va mener une politique plus hasardeuse qui lui vaudra bien des revers.
PONTCHARRA 1591
En France après l’assassinat d’Henri III en 1589, beaucoup refusent l’héritier légitime Henri de Navarre parce que protestant. Pour devenir Henri IV, celui-ci doit s’imposer à la « Ligue » catholique. A Lyon celle-ci est représentée par le gouverneur, le duc de Nemours, un autre Charles-Emmanuel, cousin du duc. Le duc de Savoie prétend au trône de France comme petit-fils de François Ier, mais la Ligue lui préfère le cardinal de Bourbon.
En 1590, profitant de la guerre civile en France, le duc de Savoie fait son entrée à Grenoble, puis investit la Provence. Fin 1590, le chef protestant du Dauphiné Lesdiguières, rallié à Henri IV, récupère Grenoble, dont il est nommé gouverneur et en 1591 il repousse les savoyards de la Provence vers le comté de Nice. En septembre 1591 à Pontcharra, ville natale de Bayard et porte d’entrée vers Grenoble, une nouvelle incursion savoyarde est vaincue.
La CAMPAGNE de 1597-1598
Deuxième acte : En 1595 Henri IV devenu catholique, déclare la guerre à l’Espagne, alliée de la Ligue, transformant une guerre civile en guerre étrangère et faisant passer les ligueurs au statut de traitres. L’Espagne passe à l’offensive dans le nord (mars 1597). Une armée espagnole venant de Milan est en route vers la Picardie en transitant par le col du Petit-Saint-Bernard et la Savoie, puis la Franche-Comté. Le Roi qui participe à la défense de la frontière du nord, nomme Lesdiguières lieutenant-général du Dauphiné à la place de d’Ornano et lui confie les opérations dans les Alpes, avec mission d’entrer en Savoie et de couper la route aux espagnols.
Lesdiguières entre en campagne à partir de Grenoble avec 6000 fantassins et 500 cavaliers. Par Allemont il leur fait traverser la chaîne de Belledonne. Ils arrivent en Savoie au col du Glandon, l’armée dévale sur St-Jean-de-Maurienne prise par surprise le 23 juin. Pour assurer ses arrières Lesdiguières repousse sans difficulté les savoyards en direction du Mont-Cenis en s’assurant de tous les points fortifiés ; mais cette opération le retarde d’une semaine pendant laquelle les espagnols arrivent à Chambéry. Il redescend alors sur Aiguebelle, y laisse son lieutenant Créqui assièger le château de Charbonnière. Ses troupes vivent au dépens du pays et se livrent volontiers au pillage et à l’incendie.
CHAMOUSSET 19 juillet 1597
Le duc de Savoie a franchi les Alpes avec 3000 hommes, mais il n’a pu retenir pour se défendre les 3000 espagnols en transit qui ont continué leur route vers le nord. Lesdiguières a donc échoué à leur couper la route. Les savoyards se concentrent à St-Pierre-d’Albigny et Miolans sur la rive nord de l’Isère. À l’époque, le cours de l’Isère en aval du confluent avec l’Arc n’était pas endigué et formait des entrelacs de bras et d’îles.
Charles-Emmanuel lance ses troupes dans la traversée risquée de l’Isère, appuyées par le château de Chamousset au sud de l’Isère, après avoir fait édifier un retranchement muni d’artillerie sur une île. Parti de Chamoux, Lesdiguières peut mettre rapidement en action 2 canons qui vont semer la panique parmi les savoyards en train de traverser la rivière. Le gros des troupes dont la cavalerie commandée par Créqui arrive s’empare du retranchement et parachève la déroute de l’armée ducale. Le château et le village de Chamousset sont pillés et incendiés.
Les MOLLETTES
Dans les jours qui suivent Lesdiguières et ses lieutenants obtiennent la capitulation du château de Charbonnière : toutes leurs troupes peuvent se regrouper dans la plaine des Mollettes au sud de l’Isère. Le Duc de Savoie a reçu des renforts ; son armée traverse l’Isère à Montmélian et prend position sur les hauteurs de Sainte-Hélène. Une première grosse escarmouche a lieu le 8 août ; une semaine se passe pendant laquelle Lesdiguières fait se retrancher ses troupes. La bataille des Mollettes a lieu le 14 août : les troupes ducales attaquent sans succès le front des troupes royales et une tentative de contournement par le flanc est balayée par une charge de cavalerie.
FORT BARRAUX
Les savoyards vaincus se replient au nord de l’Isère. Non découragés, ils occupent le village de Barraux en territoire français, où le duc décide de faire construire une forteresse, Fort Barraux, construite en quelques mois. Lesdiguières basé en face à Pontcharra laisse faire, alors que des escarmouches ont lieu en Maurienne. En février 1598, le château de Charbonnière est repris par les savoyards et Créqui est fait prisonnier. Mais en mars Lesdiguières s’empare de Fort Barraux par surprise.
LA PAIX PROVISOIRE
Peu après (mai 1598) la paix est signée à Vervins (02) entre la France et l’Espagne. Pour la Savoie, les frontières sont rétablies, de ce fait le fort Barraux redevient français : le duc l’avait fait construire pour le Roi de France… Il reste un contentieux en suspens : le sort du marquisat de Saluces (Saluzzo au sud de Turin), enclave française en Piémont, que le duc de Savoie avait occupé en 1588. Ce sera le prétexte du conflit de 1600, qui aboutira à l’annexion par la France de la Bresse et du Bugey…
Article de 2012 – Dernière modification 10/2021
Source : Jean-Pierre GOMANE – CHAMOUSSET Les MOLLETTES – Les Batailles oubliées Histori’cone Editions 2000