1362 La Bataille de Brignais

La BATAILLE de BRIGNAIS (6 avril 1362) : l’Armée royale battue par les « Tard-Venus »

Les ROUTIERS
Pendant la Guerre de Cent Ans, le Roi et les grands féodaux n’ont aucune confiance dans les « gens de pied » des milices des villes et établissements religieux ; ils préfèrent solder des mercenaires ou routiers ou « soudoyers » réunis en compagnies ou « routes ». Ils sont allemands, catalans, gascons, bretons… Ce sont des professionnels entraînés, mais plus intéressés par la solde que par les dangers du combat…

Les « TARD-VENUS » en LYONNAIS
Après le traité de Brétigny (1357), devenus sans emploi et sans solde, les compagnies de mercenaires ou routiers se répandent dans le Royaume et dans notre Région ; ils sont appelés les « Tard-venus ». A la fin de 1361, ils s’emparent du bourg de Brignais fortifié, mais mal défendu, appartenant au chapitre de Saint-Just de Lyon. Le sénéchal de Lyon Jean de Groslée qui vient de s’opposer à eux près d’Anse n’a pas assez d’hommes pour tenir tout le Lyonnais.

Brignais est tout proche : Lyon a peur ; le sénéchal, l’Eglise et le chapitre de St Just s’adressent au lieutenant du roi récemment nommé, Jean de Melun sire de Tancarville, qui lui-même requiert l’aide de l’armée royale. Celle-ci arrive commandée par le Connétable de France Jacques de Bourbon comte de la Marche. Les féodaux de la région s’assemblent sous Melun de Tancarville, ainsi que les milices de Lyon, des cités et des abbayes menées par Jean de Groslée. Cette armée réunie s’avance en direction de Brignais, en venant de Saint-Genis-Laval.
Ces mouvements de troupes ont naturellement alerté les routiers qui pillent les provinces voisines : ils viennent du Charolais, du Forez, du Vivarais, du Velay renforcer ceux de Brignais.

La BATAILLE de BRIGNAIS
Les chroniqueurs ont donné des versions différentes de la bataille.
D’après Villani, un auteur italien, les renforts de routiers attaquent à revers à l’aube le campement de l’armée royale sous Brignais, en même temps que les assiégés font une sortie. Ce 6 avril 1362, mercredi devant les Rameaux, c’est une déroute totale, car les chevaliers et miliciens surpris n’ont pas eu le temps de s’équiper.

Plan hypothétique du Champ de Bataille


Le chroniqueur français Froissart donne une toute autre version. Les routiers se seraient retranchés sur une hauteur en vue de la route de Saint-Genis-Laval à Brignais, vraisemblablement au Bois-Goyet, selon les recherches d’un historien du XIX° siècle. Ils auraient dissimulé les forces de renfort derrière les replis du terrain et sur les hauteurs des Barolles au nord. Les chefs de l’armée font preuve de la même arrogance qu’aux batailles de Crécy et de Poitiers, pensant balayer leurs adversaires, ce qui les conduit à attaquer de front les positions visibles des routiers, attaques qui sont repoussées. Ils sont alors pris à revers par tous les contingents dissimulés et taillés en pièces. Cette version parait plus crédible, car d’autres sources relatent également l’imprudence de l’armée royale.

Les VICTIMES de la BATAILLE
Louis comte de Forez, Robert de Beaujeu sire de Joux sont parmi les morts. Le connétable de France et son fils aîné blessés mourront après leur transport à Lyon. Jacques de Bourbon par un autre fils est l’ancêtre des Bourbons-Vendôme qui aboutiront au roi Henri IV…

Epitaphe de Jacques de Bourbon et de son fils Pierre

Nombreux sont les prisonniers nobles conservés pour en tirer une rançon : Melun de Tancarville, Jean de Forez frère du comte, Louis de Beaujeu sire d’Alloignet, Jean de Groslée… Quant à ceux qui n’ont pas de valeur marchande, ils sont massacrés.

Jean de Forez devenu le comte Jean II, blessé à la tête, en demeura aliéné et mourut sans descendance en 1372 : c’est la fin de la lignée des comtes de Forez, le comté passera en héritage au Duc de Bourbon.

Les SUITES de la BATAILLE
Ceux qui ont pu fuir se réfugient derrière les remparts de Lyon, que le sénéchal avait laissée bien garnie de troupes commandées par le capitaine de la ville Henri Chevriers. Les Routiers n’osent pas attaquer Lyon et quittent Brignais en 1364/1365.
A noter enfin que le chanoine de Saint-Just, qui tenait Brignais en manse, était le renommé médecin et chirurgien Guy de Chauliac, mort en 1368 : ses neveux et héritiers seront forcés de payer pour reconstruire les défenses du bourg.

Article de 2010 – Dernière modification 05/2019 – Sources : André Steyert – Nouvelle histoire de Lyon, tome 2- Bernoux & Cumin 1897  / Histoire de Brignais et de sa région – Editions des Traboules 2012